Affaire Dany Leprince : Nouveau procès, oui mais...

Publié le par news-affaire-dany-leprince.over-blog.fr

Par Roland Agret.

 

Claude Mathon, l’Avocat Général qui avait déjà requis un renvoi aux Assises par devant la Commission des Révisions, a maintenu ses positions aussi courageuses que virulentes.

Les enquêteurs, le procureur Thin, la juge Céline Brunetière, les experts et témoins complaisants se sont vus conspués, désignés comme les responsables d’une débandade judiciaire que fera date et tache.

 

Ce qui est aussi vrai qu’évident, tout le monde est d’accord.

Il y a huit ans, c’est exactement ce que nous avions découvert avec effroi et que nous hurlions aux autorités comme aux médias, avec l’impact et le résultat énorme que cela a provoqué.

 

Reste que l’instant d’euphorie passé, voilà que se profile une nouvelle enquête pour asseoir un nouveau procès. A coup sûr, elle sera sévère.

 

Si Loïc Sécher et Marc Machin qui peuvent espérer une nouvelle audience de « formalité », concernant Leprince nous changeons de moule : Pas de victime qui persiste et signe dans ses rétractations, pas de criminel qui se démasque spontanément avec preuve ADN.

Si la Chambre des Révisions, de façon objective et juste, a mis en évidence de nouveaux éléments et témoignages qui rasent les constructions de l’accusation, elle n’apporte pas une seule preuve formelle de son innocence, même si elle induit un doute sérieux et livre une nouvelle piste à l’enquête à venir.

 

Le terrain est en fait déblayé de ses miasmes et un nouvel espace s’ouvre pour tenter d’y faire s’engouffrer enfin la vérité.

 

Mais on peut être certain que la mécanique judiciaire ne va pas camper sur des béatitudes et va réviser sa boussole à 380°.

Si une possibilité de condamnation reste présente pour Leprince, elle va faire l’objet d’une charge terrible, parce qu’aujourd’hui la Justice vise clairement 2 coupables, qui jouissent d’une impunité indécente. L’injure en plus pour la mémoire des victimes.

Et cela, il faut le savoir parce que ne pas l’envisager et ne pas prévoir une réplique, pourrait-être une erreur fatale.

 

Voici l’analyse probable qui, au fil du temps, va se tisser puis s’ancrer dans un nouvel esprit judiciaire qui va s’étoffer dans le redoutable.

 

Que reste t-il aujourd’hui des 9 tomes de dossier ?

Une seule base : En principal les déclarations des témoins dits oculaires, c’est à dire Martine Leprince et sa fille Célia.

 

Martine ? A moins qu’elle étaye une nouvelle version dans laquelle elle pousse son « étrange aveu » par devant les experts, qu’elle apporte des éléments concrets irréfutables, elle est d’office « la complice présumée et presque avouée ». Donc, sans une once de crédibilité.

Quoi que : Si elle explique ses lessives intempestives, ce qu’elle voulait laver en urgence…Si elle indique un endroit qui peut receler les instruments de la tuerie…

Elle est maître de la nouvelle donne dans la mesure où elle en prouve.

Mais de son côté, tant de choses peuvent évoluer, dans le meilleur comme dans le pire…

 

Célia ? Dans toutes ses déclarations, il y a une constante : Elle a vu son père tuer son oncle devant la boîte aux lettres. Dans le même temps, elle entend des hurlements et des bruits dans la maison des victimes. Elle n’a ni entendu ni vu sa mère jusqu’au lendemain demain matin.

Sur ses seules déclarations une reconstitution est possible, mais elle ne l’est plus si on y raccorde celles de sa mère, pire qu’extravagantes.

 

Nous avons déjà non pas une, mais 2 scènes de crimes.

Une extérieure et une dans la maison de l’horreur.

Selon Célia, les deux massacres seraient simultanés et nous la rejoignons objectivement.

On peut facilement imaginer qui oeuvrait monstrueusement chez Christian.

Mais qui assassinait Christian au même moment ?

Le jardinier que l’on désignait comme son amant ? Il a été innocenté par preuve ADN.

Alors qui ?

Parce que dans ce périmètre restreint, il n’y a pas grand monde à suspecter.

Un proche de Martine, complice agissant, c’est certain. Et le qui devient lancinant.

 

Du côté de la nouvelle accusation, bien des regards se porteront alors vers Leprince qui ne pourra pas les éviter. Il devra affronter et répondre.

Son aveu d’avoir seulement tué son frère risque de prendre une allure suspecte en cette 46 ème heure de garde à vue.

En effet, ses détracteurs ne manqueront pas de souligner que Dils, Padé, Pascal Labarre et bien d’autres, confrontés à pareille pression ont tout reconnu en vrac, en bloc, même ce qu’ils ne pouvaient pas avoir fait.

Ajoutant que dans ces cas là, on s’affale, on dit tout et n’importe quoi, surtout ce que veulent entendre les enquêteurs…

Ici, ce n’est pas le cas et on peut prévoir que cet aveu va apparaître comme étrangement sélectif. Dans cette logique, il deviendra probablement choquant si l’on sait que chez la juge, Leprince a ajouté : « Pour les autres, on verra après », sans un seul mot de douleur ou de simple compassion envers les victimes.

Et de là franchir le pas à dire que, s’il n’a pas laissé la moindre trace dans la maison, c’est parce qu’il n’a occupé que la scène extérieure, l’accusation ne s’en privera certainement pas.

 

A plus forte raison que ce raisonnement, mettant bout à bout ces bases de données, ne déraille pas dans l’absurde.

 

On peut aussi compter sur le fait que les « accusations de la maman Renée », même si contraintes, vont être brandies à l’audience et que le fameux couteau gravé Leprince, retrouvé un an après sa condamnation, a été retrouvé sur l’une des routes qui mènent à la SOCAPA…

A mon avis, les nouveaux enquêteurs devraient peut-être y balancer quelques bons coups de bêche…

 

Prenant les données réduites du dossier à ce jour, voilà à mon avis quelle mélasse Leprince devra affronter. C’est dire l’angle aigu de l’exercice qui mérite que l’on s’y prépare !

 

Nous pouvons encore compter sur quelques rebondissements sur le vecteur du grave au spectaculaire, qui peuvent encore apporter de nouveaux éclairages sur le drame.

C’est l’enquête et ce qu’elle peut déclencher en réactions qui nous le dira.

 

Pour avoir subi ce genre de trémies judiciaires, y compris dans pas mal d’affaires que j’ai soutenu, je sais de quoi je parle.

 

Je voulais seulement en prévenir, parce que certaines tactiques et certitudes affichées me semblent exonérées de toute lucidité.

 

Je prévois que la condamnation de Leprince sera annulée le 6 avril et qu’il sera renvoyé vers de nouveaux Cieux judiciaires.

En plus du dossier d’accusation démantelé, il y a une dimension humaine délicate à considérer. Sa mise en suspension de peine pèsera lourd dans la décision de la Chambre des Révisions.

En effet, un rejet signifierait que le « suspendu » soit immédiatement réincarcéré.

Une « sale besogne » qui serait une démonstration de cynisme et d’inhumanité. Un bis repetita insupportable de l’Affaire Guillaume Seznec.

Suffisant pour transférer toutes les responsabilités sur les genoux d’un Président de Cour d’Assises.

 

Si je crois que Leprince est non coupable (Je pense qu’il n’était pas sur les lieux au moment de la tuerie), prenant en référence les éléments qui sont aujourd’hui en ma possession, je n’en pense pas moins que la nappe du doute qui l’englue à présent n’en est pas moins justifiée.

 

Il y a des comportements qui ne pardonnent rien et calquent durablement le droit fil de certains personnages.

Et Leprince devra souquer ferme pour en démontrer.

Aux Assises, humour, hésitations et balbutiements sont prohibés.

 

Avec encore un gros morceau de temps à mettre dans la besace de sa patience, le 6 avril il sera presque « tout neuf », rétabli « présumé innocent » avec l’annulation de sa condamnation, pour le grand jour V d’un nouveau procès qui se profile enfin.

 

V comme vérité.

 

Celle que l’on doit à tous les justiciables et surtout à la mémoire des victimes.

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